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Guerre, le roman de Céline découvert 60 ans après sa mort

Posted on juillet 18, 2025juillet 20, 2025 By jeansaistrop76@gmail.com Aucun commentaire sur Guerre, le roman de Céline découvert 60 ans après sa mort

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Sommaire

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  • 📚 « Guerre » de Louis-Ferdinand Céline : Une Plongée Inédite au Cœur du Traumatisme de 14-18 🤯
    • 🔍 Le Mystère Révélé : Contexte de la Découverte et Publication de « Guerre »
      • 🤫 Le Vol et la Restitution des Manuscrit Inédits
      • ✍️ Un Manuscrit de « Premier Jet » : Le Travail Éditorial
    • 📖 « Guerre » : Un Voyage au Bout du Traumatisme
      • 💥 La Blessure et le Chaos du Front (Séquences 1 & 2)
      • 🏥 La Convalescence à Peurdu-sur-la-Lys (Séquences 3, 4, 5 & 6)
      • 🚢 L’Évasion vers Londres (Fin de Séquence 6)
    • 🧐 Analyse : Les Profondeurs de l’Œuvre Célinienne
      • 🎭 Autobiographie et Fiction : Une Frontière Floue
      • 🧠 Le Traumatisme Indélébile de la Guerre
      • 💪 La Survie et la Déchéance Morale
      • 👤 Des Personnages Marquants et Symboliques
      • 📝 Le Style Célinien : Brutalité et Musique
    • 🔗 « Guerre » dans la Grande Tapisserie de l’Œuvre Célinienne
      • 🌉 Un Pont vers « Voyage au bout de la nuit »
      • 🔙 Des Échos Profonds avec « Mort à crédit »
      • ⚔️ Des Liens avec « Casse-pipe » et « Guignol’s Band »
      • 🌍 La Construction d’une Œuvre Coherente
    • 🌟 Conclusion : « Guerre », Un Récit Inoubliable

📚 « Guerre » de Louis-Ferdinand Céline : Une Plongée Inédite au Cœur du Traumatisme de 14-18 🤯

Soixante ans après sa mort, un roman inédit de Louis-Ferdinand Céline, intitulé « Guerre », a enfin été publié, dévoilant une pièce capitale de son œuvre et de sa vie. Ce texte, longtemps disparu, offre une perspective crue et intime sur l’expérience traumatisante de l’auteur durant la Première Guerre mondiale, qu’il a littéralement « attrapée dans sa tête ». Loin d’être un simple récit de guerre, « Guerre » est une exploration profonde des séquelles physiques et psychologiques, un mélange unique de récit autobiographique et d’imagination romanesque qui enrichit considérablement notre compréhension de l’univers célinien.


🔍 Le Mystère Révélé : Contexte de la Découverte et Publication de « Guerre »

Le manuscrit de « Guerre », composé de deux cent cinquante feuillets, avait été évoqué par Céline lui-même dès 1934 dans une lettre à son éditeur Robert Denoël, aux côtés d’autres titres comme « Mort à crédit », « Enfance » et « Londres ». Cependant, ce texte est resté inédit pendant des décennies, son destin étant lié à une histoire rocambolesque de disparition.

🤫 Le Vol et la Restitution des Manuscrit Inédits

Ces manuscrits inédits, dont « Guerre » et une partie de « Mort à crédit », ont été volés dans l’appartement de Céline à l’époque de la libération de Paris en 1944. L’auteur s’était d’ailleurs plaint de ce vol depuis sa prison danoise, et la liste des manuscrits retrouvés correspondait bien à ceux qu’il mentionnait. Après une longue période d’absence, ils ont été restitués aux héritiers de Lucette Almansor, la veuve et unique héritière de Céline, qui en était la légitime propriétaire. Cette restitution a « fait couler beaucoup d’encre », marquant un événement éditorial majeur : c’est « la première fois que, tant d’années après la mort d’un écrivain, en l’espèce soixante ans, des textes de cette importance sont retrouvés et peuvent ainsi être publiés ».

✍️ Un Manuscrit de « Premier Jet » : Le Travail Éditorial

Le manuscrit de « Guerre » se distingue par son écriture « très rapide, manifestement de premier jet ». De nombreux mots étaient difficiles à déchiffrer, certains même sont restés illisibles. Ceci contraste avec le manuscrit de « Voyage au bout de la nuit », qui était beaucoup plus lisible car il s’agissait du « dernier état du livre, recopié par Céline lui-même ».

L’édition de « Guerre » a nécessité un travail méticuleux pour restituer le dernier état de rédaction, avec des corrections minimales d’orthographe (uniquement si l’erreur n’était pas volontaire), le développement des abréviations fréquentes, la conservation de mots biffés par erreur, et la rétablissement de mots omis en italique entre crochets. La ponctuation a été corrigée ou ajoutée « dans les cas où elle aide la lecture », et les noms propres ont été unifiés. Des alinéas et des tirets pour les dialogues ont été introduits pour faciliter la lecture, car ils sont « généralement peu nombreux dans ses manuscrits ». Ce travail minutieux a permis de rendre accessible ce texte brut et puissant au public.


📖 « Guerre » : Un Voyage au Bout du Traumatisme

Le roman « Guerre » débute alors que le héros, Ferdinand, double de Céline, vient d’être grièvement blessé et se réveille, seul survivant, au milieu de ses camarades morts sur le champ de bataille. Le récit est divisé en six séquences, la première portant sur la blessure et ses suites immédiates.

💥 La Blessure et le Chaos du Front (Séquences 1 & 2)

Le livre s’ouvre sur les mots saisissants de Ferdinand : « J’ai attrapé la guerre dans ma tête. ». Cette phrase résume l’essence même de l’œuvre et du traumatisme de Céline. Ferdinand raconte qu’il a été grièvement blessé au bras droit et « très probablement à la tête » le 27 octobre 1914, à Poelkapelle, en Belgique. Il gît sur le sol, couvert de sang, perdant connaissance par intermittence, entouré de cadavres. Il souffre de faim et de soif, avant de finalement parvenir à se relever.

Le père de Louis Destouches (Céline), Ferdinand Destouches, avait écrit une lettre le 5 novembre 1914 confirmant que son fils avait été « frappé sous Ypres » alors qu’il transmettait des ordres, et que la balle avait fracturé l’os de son bras droit. La douleur était si vive qu’il dut descendre à Hazebrouck lors de son transport vers Dunkerque, où un officier anglais l’a conduit à la Croix-Rouge. Le capitaine Schneider, commandant du régiment de Louis Destouches, a confirmé son « comportement héroïque » et son courage sous le feu, ce qui lui valut la médaille militaire dès le 24 novembre, puis la croix de guerre.

Cependant, la blessure à la tête mentionnée dans le roman n’a « jamais été homologuée ». Pourtant, Céline s’est plaint toute sa vie de névralgies et de violents acouphènes, « comme si un train lui passait dans la tête ». Cette blessure interne, qu’il attribue à avoir été « projeté par un éclatement d’obus contre un arbre », est un élément clé de son état mental et physique. Il se souvient de s’être endormi « dans le bruit atroce depuis décembre 14 ».

Après s’être relevé, Ferdinand erre seul au milieu des décombres, des chevaux éventrés, des rats et des cadavres. Il boit du bordeaux trouvé sur un soldat mort et même son propre sang. Il rencontre un soldat anglais avec qui il tente de rejoindre Ypres. Ferdinand, bien qu’il ait eu du mal à apprendre l’anglais auparavant, se met à parler naturellement avec le soldat. L’aide de l’Anglais le console un peu. Mais dans son délire et sa fièvre, Ferdinand tente de retourner « du côté de l’ennemi » avant d’être finalement ramené par l’Anglais et une patrouille de cavaliers.

Il se réveille ensuite dans un premier hôpital de campagne, une « ambulance » installée dans une église. Il y décrit des hallucinations et des visions, comme le général Métuleu des Entrayes (qui deviendra Céladon des Entrayes dans Voyage au bout de la nuit). Suite à un bombardement, les blessés sont évacués par train, dans des wagons remplis de « morts » et de l’odeur de phénol. Il délire, voit des camarades morts comme Kersuzon, Keramplech, Gargader, et Le Cam, qui lui reprochent son « lâcheté » ou sa « désertion ».

🏥 La Convalescence à Peurdu-sur-la-Lys (Séquences 3, 4, 5 & 6)

Ferdinand est finalement transporté à Peurdu-sur-la-Lys, une ville qui correspond à Hazebrouck dans la réalité. Il est admis à l’hôpital « Le Virginal Secours ». Il y est confronté à une réalité cruelle et grotesque.

  • Mlle L’Espinasse : Soignante et Manipulatrice 💔 C’est ici qu’il fait la connaissance de Mlle L’Espinasse, l’infirmière en chef, inspirée « probablement » de l’infirmière Alice David avec qui Louis Destouches aurait eu une liaison. L’Espinasse est un personnage complexe et ambigu. Elle apparaît comme une femme dévouée, mais aussi manipulatrice, autoritaire et « passionnée ». Elle sonde Ferdinand, le « branle » (terme argotique pour le masturber ou le manipuler). Ferdinand la décrit comme sa « seule protection » dans cet environnement. La rumeur selon laquelle Alice David aurait eu une fille avec Céline est « sans l’avoir lu » le manuscrit démentie par le texte.
  • Les Parents et la « Honte » 👨‍👩‍👦 Les parents de Ferdinand, qui tiennent un magasin de dentelles au « passage des Bérésinas » (comme dans Mort à crédit), viennent lui rendre visite. Leurs interactions sont tendues et pleines de reproches, bien plus « conflictuelles » que les relations affectueuses que Louis Destouches entretenait avec ses propres parents. Ils sont angoissés par les dettes de leur fils, notamment celle de trois cent vingt-deux francs à Mme Onime, la cantinière. Cette scène fait écho aux difficultés financières de la famille Destouches et aux dettes de Céline avec la cantinière Mme Leurbanne dans Casse-pipe. Les parents de Ferdinand, aveuglés par leur optimisme et leur besoin de nier l’horreur de la guerre, refusent de comprendre la souffrance de leur fils et les atrocités du monde.
  • Bébert/Cascade : L’Ami Pimp et le Destin Tragique 🎭 Ferdinand se lie d’amitié avec Bébert, un jeune homme de dix-neuf ans et demi, blessé au pied, qui se révèle être un souteneur et qui devient ensuite Cascade. Bébert, très dégourdi (« dessalé »), lui ouvre de nouveaux horizons et l’initie aux réalités du monde hospitalier et de la survie. Il lui apprend à naviguer dans le système et à se méfier. Cascade est marié à Angèle, une prostituée, et se livre à un trafic d’argent. La relation entre Ferdinand et Cascade est centrale, faite de camaraderie et d’échanges sur la vie et la survie. Cependant, Cascade finit par être fusillé. Il est accusé d’automutilation, comme le neveu de Cascade Farcy dans Guignol’s Band. Ferdinand se sent coupable d’avoir indirectement précipité son sort en lui volant son papier pour aller voir l’enclos des exécutions.
  • L’Enquête du Conseil de Guerre ⚖️ Malgré sa médaille militaire pour « bravoure », Ferdinand est inquiet. Il est interrogé par le Commandant Récumel, un « rapporteur au conseil de guerre », qui enquête sur la destruction de son convoi. Ferdinand, terrifié à l’idée d’être accusé de « désertion » ou « d’abandon de poste », refuse de parler, feignant le délire, et se sent « séparé du monde ». L’Espinasse tente de l’aider en guidant ses réponses, montrant son « autorité ».
  • Angèle et la Survie par la Prostitution 💰 Angèle, la femme de Cascade, est une figure majeure. Prostituée, elle représente la survie dans un monde dévasté par la guerre. Elle est décrite comme « bandatoire de naissance », « jouisseuse » et dotée d’un « goût de l’étranger ». Elle manipule les officiers anglais, utilisant son corps pour de l’argent et des laissez-passer. Ferdinand est d’abord spectateur, puis acteur de ses stratagèmes, apprenant à ses côtés les dures lois de la survie. Il est fasciné par sa capacité à défier Cascade et à s’émanciper. Angèle parvient à corrompre Destinée, la serveuse du café l’Hyperbole, où elle et Ferdinand passent du temps.

🚢 L’Évasion vers Londres (Fin de Séquence 6)

Le roman s’achève sur le départ « rocambolesque » de Ferdinand pour l’Angleterre. Angèle lui propose un plan pour quitter la ville avec un ingénieur anglais, le Major Cecil B. Purcell, qu’elle exploite sexuellement. Ferdinand utilise sa médaille et son « culot » pour extorquer à Mlle L’Espinasse un laissez-passer de six mois de permission pour Londres, menaçant de révéler ses pratiques douteuses à l’hôpital. Le voyage en bateau est décrit avec une sensation de liberté retrouvée, mais toujours avec le « bruit » de la guerre dans sa tête. Son départ pour Londres marque la fin de cette période intense et le début de nouvelles aventures, qui seront probablement racontées dans l’autre manuscrit retrouvé, « Londres ».


🧐 Analyse : Les Profondeurs de l’Œuvre Célinienne

« Guerre » est bien plus qu’un simple témoignage. C’est une œuvre qui cristallise les thèmes et le style célinien, explorant la nature humaine face à l’horreur, la survie et la désillusion.

🎭 Autobiographie et Fiction : Une Frontière Floue

« Guerre » tient à la fois du « récit et du roman », un récit qui « devient de plus en plus romancé ». Si les premières pages ont « un accent de vérité » et correspondent à ce qui s’est passé (blessure, aide du soldat anglais, Hazebrouck, médaille), Céline « exagère romanesquement » certains faits, notamment la cause de sa blessure à la tête. Le roman « prend très vite le pas sur la réalité ». Il est « difficile ensuite de faire le partage entre la réalité et la fiction ». Les personnages principaux (Bébert/Cascade, L’Espinasse, Angèle) voient leurs traits de caractère « très fortement accentués ».

🧠 Le Traumatisme Indélébile de la Guerre

Le thème central de « Guerre » est le traumatisme profond de la guerre, symbolisé par la phrase liminaire : « J’ai attrapé la guerre dans ma tête. ». Cette blessure psychique et physique est une constante de l’œuvre de Céline. Ferdinand souffre en permanence de maux de tête, de névralgies et d’acouphènes, un « bruit immense » qui ne le quittera jamais, « comme un train » dans sa tête. Ce « vacarme d’oreille » le coupe du monde et affecte sa perception de la réalité. Ce roman exprime l’horreur de la guerre et de la mort, des constantes chez Céline. La guerre est dépeinte comme un « abattoir international en folie », laissant des hommes « mutilés dans leur chair et dans leur esprit ». Ferdinand, comme d’autres anciens combattants, est imprégné de l’idée du « plus jamais ça ».

💪 La Survie et la Déchéance Morale

Face à cette horreur, Ferdinand apprend à survivre en s’affranchissant des codes moraux. Il passe de « gentil garçon » à un être cynique et opportuniste. Il « n’avait plus rien à l’humanité » de son éducation bourgeoise. La guerre a transformé sa « bidoche » et son esprit. Il apprend à « déconner » pour ne pas être « encaissé » parmi les morts. Il ment, manipule, et s’adapte à un monde où les règles ont changé. Le sexe est omniprésent, souvent brutal et dénué de tendresse, comme un moyen de survie ou de distraction. Ferdinand s’implique dans les stratagèmes d’Angèle pour gagner de l’argent et un laissez-passer.

👤 Des Personnages Marquants et Symboliques

  • Ferdinand : L’Alter Ego Mutilé Le narrateur est le double de Céline. Son évolution est centrale : blessé, il traverse des états de délire et de semi-conscience, marqués par la douleur et les bruits intérieurs. Il se forge une « âme plus dure, comme un biceps ». Sa médaille militaire est un symbole ambigu : reconnaissance d’une bravoure, mais aussi instrument de manipulation et de jalousie.
  • Mlle L’Espinasse : Le Pouvoir Pervers Infirmière à Peurdu-sur-la-Lys, Aline L’Espinasse (possiblement inspirée d’Alice David) incarne une forme d’autorité et de perversion. Elle est la « sondeuse », celle qui « branle » les blessés, se livrant à des « pratiques que la morale réprouve ». Elle est décrite comme « costaud » et puissante, capable de manipuler les médecins et les patients. Elle « s’attache » à Ferdinand, mais elle est aussi une figure ambivalente de soin et de jouissance.
  • Bébert / Cascade : Le Destin Tragique de l’Homme Brutal Bébert, qui prendra le nom de Gontran Cascade, est un souteneur. Il est présenté comme un personnage pragmatique, un « dissalé » qui a choisi sa vie et sait naviguer dans la débrouille. Sa relation avec Angèle est violente et passionnelle. Sa mort par fusillade, pour automutilation, est un point culminant tragique du roman, soulignant la brutalité absurde de la guerre. Son personnage est un « double » pour Ferdinand, l’instruisant aux réalités de la survie.
  • Angèle : La Force de la Sexualité et de la Vengeance La femme de Cascade, Angèle, est une prostituée qui incarne la sexualité comme force de survie et d’émancipation. Elle est décrite comme « bandatoire de naissance », « jouisseuse » et manipulatrice, capable de se « donner des sales allures » pour son propre bénéfice. Elle utilise son corps pour se sortir d’affaire et même pour se venger, notamment de Cascade. Elle représente une figure de défi et de résilience, mais aussi de froide opportunité.
  • Les Parents : L’Illusion Bourgeoise Les parents de Ferdinand sont le symbole de la bourgeoisie naïve et déconnectée de la réalité de la guerre. Ils se lamentent de leurs soucis matériels, nient les atrocités et s’accrochent à une vision idéalisée du monde et de leur fils. Leur « énorme optimiste, niaise, pourrie connerie » est une source de « dégoût » pour Ferdinand, qui y voit le reflet de sa « garce de jeunesse qu’était morte ».

📝 Le Style Célinien : Brutalité et Musique

« Guerre » est un exemple précoce du style qui fera la renommée de Céline.

  • Langue Populaire et Argotique : Le texte est traversé par une langue crue, populaire et argotique, avec des mots comme « branler », « gonzesse », « tête de lard », « foiron », « mouscaille », « raclure » [lexique, 298-305]. Ce vocabulaire contribue à l’authenticité et à la violence du récit.
  • Voisinage du Tragique et du Comique : Céline manie « le voisinage constant du tragique et du comique ». Malgré l’horreur, l’absurdité de certaines situations et les dialogues percutants apportent une dimension burlesque et parfois hilarante.
  • Rythme et Oralité : Le style de « premier jet » donne une impression d’urgence et d’oralité, avec des phrases courtes, des répétitions, et un rythme saccadé qui reflète le chaos intérieur de Ferdinand. La « ponctuation n’a été corrigée ou ajoutée que dans les cas où elle aide la lecture », et les dialogues sont systématiquement renvoyés à la ligne.
  • Le « Bruit » et les Hallucinations : Le « bruit » constant dans la tête de Ferdinand, tel un « ouragan personnel » ou une « fanfare particulière », est une métaphore puissante du chaos mental et sensoriel induit par le traumatisme de guerre. Cela se traduit par des hallucinations visuelles et auditives, brouillant la frontière entre la réalité et le délire.

🔗 « Guerre » dans la Grande Tapisserie de l’Œuvre Célinienne

La réapparition de « Guerre » comble un « vide sur un épisode capital de la vie et de l’œuvre de l’écrivain », en s’inscrivant « de façon cohérente dans son œuvre et dans la chronologie qui en forme la trame narrative ».

🌉 Un Pont vers « Voyage au bout de la nuit »

Bien que les événements de « Guerre » se déroulent chronologiquement avant « Voyage au bout de la nuit » (publié en 1932), le manuscrit de « Guerre » a été écrit « après la publication du Voyage », probablement en 1933-1934. Céline estimait alors « Voyage » « achevé », ce qui signifie que « Guerre » n’est pas un extrait exclu de son premier roman.

« Guerre » constitue en quelque sorte un prélude détaillé à l’expérience de Bardamu dans Voyage. Le Voyage commence par l’engagement et la participation de Bardamu à la guerre, mais ne consacre qu’une quarantaine de pages à cet épisode, évoquant la blessure et la médaille mais sans les détails de la mission ou des semaines d’hôpital. C’est dans « Guerre » que l’on retrouve « le héros dont on ne connaît que le prénom, Ferdinand ». On y retrouve des personnages comme Kersuzon, qui meurt dans le Voyage, et le général Métuleu des Entrayes, qui apparaît également dans Guignol’s Band II. Céline exprime dans les deux ouvrages son « horreur de la guerre et de la mort ».

🔙 Des Échos Profonds avec « Mort à crédit »

Les « proximités de Guerre avec Mort à crédit sont plus nombreuses et renvoient directement à la vie du jeune Louis Destouches ».

  • Enfance et Famille : Les parents de Ferdinand tiennent un magasin au « passage des Bérésinas », comme dans Mort à crédit. Sa mère, nommée Célestine puis Clémence, vend des dentelles. Le père de Ferdinand travaille pour « La Coccinelle », une compagnie d’assurance, à l’image du père de Céline à « Le Phénix ». La « légère claudication » de la mère de Ferdinand (« jambe de laine ») correspond à la jambe atrophiée de Marguerite Destouches.
  • Séjours en Angleterre : Ferdinand se rappelle ses séjours d’adolescent en Angleterre et ses difficultés à apprendre la langue, des thèmes transposés dans Mort à crédit.
  • Bijoutier : Il se souvient de son emploi chez un bijoutier spécialisé dans la ciselure (inspiré de Wagner dans la réalité, Gorloge dans Mort à crédit), qu’il a dû quitter après un vol.
  • Le Sexe : Le sexe est « omniprésent » et « très cru » dans les deux romans.
  • « La Volonté du Roi Krogold » : Cette légende est citée plusieurs fois dans « Guerre », comme dans Mort à crédit, avec les personnages de Gwendor, Joad, Thibaut et Wanda.

⚔️ Des Liens avec « Casse-pipe » et « Guignol’s Band »

  • « Casse-pipe » : La théorie selon laquelle « Guerre » pourrait être la suite ou la fin de Casse-pipe est évoquée, même si le début de Casse-pipe (la mobilisation et les trois mois au front) manque encore. L’épisode de la caisse du régiment pillée est mentionné trois fois dans « Guerre », un événement central dans « L’histoire de Casse-pipe » qui explique la peur de Ferdinand face au conseil de guerre. La figure de la cantinière endettée est également un lien.
  • « Guignol’s Band » : Le nom de Cascade se retrouve dans Guignol’s Band, bien qu’il ne s’agisse pas du même personnage, mais le motif de la femme pimp (Angèle) et de la mutilation auto-infligée (le neveu de Cascade, Raoul Farcy, fusillé) sont des similitudes frappantes. Le séjour à Londres, qui suit « Guerre », est également un thème de Guignol’s Band.

🌍 La Construction d’une Œuvre Coherente

« Guerre » s’intègre parfaitement dans la chronologie des événements vécus par Céline, même si ses romans ne présentent jamais une « concordance exacte » avec sa vie. Ce texte « comble un vide » et offre un aperçu fondamental de la « prise de conscience » et de la « désillusion » de l’auteur face à un monde absurde et violent. Il est une « géniale apothéose » à l’œuvre de Céline, comparable à nulle autre.


🌟 Conclusion : « Guerre », Un Récit Inoubliable

« Guerre » n’est pas seulement un roman inédit ; c’est une pièce maîtresse qui jette une lumière nouvelle sur l’imaginaire et la biographie de Louis-Ferdinand Céline. Ce texte de « premier jet », d’une intensité et d’une crudité rares, plonge le lecteur dans le chaos sensoriel et psychique d’un soldat profondément blessé.

En entremêlant souvenirs authentiques et fiction débridée, Céline dépeint le traumatisme indélébile de la Grande Guerre, un « bruit immense » enfermé dans sa tête pour toujours. À travers Ferdinand, il explore la déchéance morale nécessaire à la survie, la brutalité des relations humaines et la confrontation entre l’innocence perdue et la dure réalité du monde.

Les personnages emblématiques comme l’énigmatique Mlle L’Espinasse, l’ami tragique Cascade, et la résiliente Angèle, incarnent les facettes complexes de l’humanité face à l’adversité. Le style « célinien », avec sa langue argotique, son mélange de tragique et de comique, et son rythme fiévreux, est déjà pleinement formé dans ce manuscrit, montrant la puissance de l’écriture de l’auteur.

La publication de « Guerre » est un événement majeur qui permet de comprendre plus en profondeur la genèse de l’œuvre de Céline, ses obsessions et la manière dont son expérience de la Première Guerre mondiale a forgé son regard unique sur l’existence. Ce roman, à la fois témoignage et création pure, réaffirme la place singulière de Céline dans la littérature du XXe siècle, un écrivain dont le passé, même « saoul d’oubli », reste « à jamais inoubliable ». C’est une lecture essentielle pour quiconque souhaite explorer les abîmes de l’âme humaine face à la guerre.

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